Pour des indicateurs RSE intégrés aux indicateurs financiers

 

Pour des indicateurs RSE intégrés aux indicateurs financiers

Entretien avec Hervé Gbego, président du groupe RSE de la DFCG

Publié le 7 avril 2021

Le Groupe RSE créé en 2019 vient de publier sa première contribution avec un Livre blanc sur l’intégration financière & les comptabilités socio-environnementales en partenariat avec le Conseil supérieur de l’Ordre des experts-comptables.

Et Hervé Gbego, son président, de nous expliquer la genèse de ces travaux….

 

Hervé Gbego, vous avez créé le groupe RSE de la DFCG. D’où vous vient cette inclinaison pour ce sujet ?

Dans mon métier d’expert-comptable et de commissaire aux comptes, je me suis très rapidement focalisé sur ces questions de comptabilité environnementale et sociale, qui sont dès lors devenues les activités prédominantes de mon cabinet.

Chercher, défricher et innover : ce sont pour moi des inclinaisons fortes. Dans ce cas de figure, spécifiquement lorsqu’on est un praticien, il est important de partager et de confronter les points de vue. Ce qui m’a amené à participer à de nombreux groupes de travail. Que ce soit à la DFCG avec le groupe d’échanges que j’ai la joie d’animer ou encore au Conseil supérieur de l’Ordre des experts-comptables au sein du comité de normalisation extra-financière et RSE dont la présidence m’a été confiée.

 

Très rapidement les travaux du groupe se sont orientés vers l’écriture d’un Livre blanc. Pourquoi ?

Permettez-moi tout d’abord de remercier les membres du groupe très impliqués dans la rédaction de ce livre blanc.

Un Livre blanc qui nous est très vite apparu comme évidence, fort de deux constats :

Le premier, c’est que les directeurs financiers sont insuffisamment mobilisés sur ces enjeux tandis qu’au niveau européen un rapprochement entre indicateurs financiers et extra-financiers est à l’œuvre. Désormais la performance se pilote également à ce niveau.

Le second tient à des investisseurs de plus en plus sensibles à ces sujets – je pense notamment aux fonds ISR. Ils exigent une lecture de plus en plus financière des indicateurs sociaux et environnementaux.

 

Quelle a été votre méthode d’élaboration ?

Nous avons commencé par mener une enquête auprès des dirigeants financiers pour évaluer leur maturité sur ce sujet et mieux comprendre leurs attentes. Nous avons pu ainsi constater qu’ils attendent un état des lieux des différentes méthodologies existantes ainsi qu’une grille de lecture et de correspondance à des situations et des objectifs définis.

C’est donc ce que nous nous sommes efforcés de restituer. C’est en somme un état de l’art, décrypté pour le rendre utile à ses lecteurs. Sans omettre quelques préconisations en toute fin.

 

Quels types de préconisation ?

Au principal, nous invitons les dirigeants financiers à faire un pas vers des indicateurs intégrés aux comptes classiques. Et c’est d’ailleurs là que réside leur principale valeur ajoutée.

A cet effet, il y a un vrai challenge en termes de formation que la DFCG a toute légitimité à adresser.

 

En matière de normalisation, des avancées ne sont-elles pas nécessaires pour harmoniser les pratiques ?

Bien sûr qu’il est nécessaire de travailler sur une normalisation des pratiques, notamment grâce à l’implication de normalisateurs comme l’ANC.

Au niveau européen, le green deal permettra l’injection d’environ 100 milliards d’euros pour verdir l’économie. De plus, une refonte de la déclaration de le performance extra-financière (DPEF ou NFRD) est en cours. Elle vise au rapprochement entre indicateurs financiers et indicateurs extra-financiers sans aller vers une intégration pure et simple. Il existe également une taxonomie verte européenne permettant de définir dans les comptes de l’entreprise le niveau de verdissement de son activité classique.

Par ailleurs, l’Union européenne a confié à l’EFRAG le soin de travailler sur une harmonisation des pratiques sur les reporting RSE et ESG au niveau européen. Un projet porté notamment par Patrick de Cambourg, le président de l’ANC.

 

Le niveau international n’est-il pas le plus pertinent ?

Le niveau international connait également de grandes manœuvres. Le SASB qui est le pendant de l’IASB s’agissant des normes RSE, est en passe de fusionner avec IIRC et le GRI (international reporting) … On assiste donc à une organisation et une consolidation de tous ces courants, ce qui est le prélude à une véritable avancée en termes de normalisation.

Le seul problème c’est que pour le moment il n’y a rien de vraiment nouveau sur le plan normatif. En France, le reporting RSE obligatoire date de 2001 avec la loi NRE, poussé plus avant en 2011 pour le Grenelle 2 de l’environnement. Les fonds ESG existent depuis les années 60.

Il faudrait lancer rapidement le chantier sur l’intégration directe des indicateurs RSE aux indicateurs financiers. Car actuellement le double système d’indicateurs financiers et extra-financiers est bancal. Il ne permet pas aux analystes financiers d’avoir une vue globale au risque de ne plus parvenir à noter de manière cohérente.